La Panthéonisation
d’Émile Zola
par
Denise Le Blond-Zola
Extrait de : Vie d’Émile Zola p. 43-44
Source :
Collection des Œuvres Complètes
Émile Zola
Contes à Ninon
Et
Nouveaux Contes à Ninon
Précédés d’une Vie de l’Auteur par
DENISE LE BLOND-Zola
Texte de l’édition Eugène Fasquelle
Typographie
FRANÇOIS BERNOUARD
75, Rue des Saints-Pères, 75
A PARIS
(…) Le Parlement, ayant voté la translation des cendres de Zola au Panthéon, la date du 5 juin 1908 avait été choisie pour la cérémonie. La veille, le corps, exhumé au cimetière Montmartre, fut transporté au Panthéon, à la tombée du jour, par des rues détournées. Desmonlin et Fasquelle l’accompagnaient.
Une manifestation des camelots du roi excités par M. Léon Daudet, hurlait à la mort, tandis que le cercueil montait les marches du temple de gloire et qu’un formidable service d’ordre entourait le monument.
Quelle honte pour ceux qui poussaient ces cris odieux contre un mort ! Et quelle indignation soulevait nos amis ! Cette translation, qui aurait dû s’accomplir dans un calme imposant, se trouvait encore grandie par les sifflets et les injures. Toute la nuit, la manifestation continua pour s’achever au matin.
Le Président de la République, Armand Fallière, Georges Clemenceau et le général Picquart, parvenus tous deux au pouvoir, assistaient au premier rang à l’apothéose officielle du lendemain. M. Gaston Doumergue, ministre de l’Instruction publique, lut le panégyrique d’usage.
Le catafalque disparaissait sous les fleurs, un détachement de gardes républicain, sabre au clair, montait la garde tout autour. Le vaste et grandiose vaisseau du Panthéon était comble, les uniformes, les toilettes se pressaient de tous côtés. La musique de Bruneau emplissait les voûtes sonores de son ample symphonie. La cérémonie s’achevait dans un calme auguste, lorsqu’un misérable tira sur Alfred Dreyfus et le blessa au bras. Durant un instant, une émotion poignante étreignit l’assemblée qui, peu après, rassurée quant à la légèreté de l’attentat, sortit sur les marches entre les hautes colonnes, pour voir défiler les troupes sous le clair soleil, aux accents des sonneries des divers régiments groupés devant la Mairie du Ve et la Faculté de Droit, casques brillant aux rayons de midi, culottes blanches se détachant sur les chevaux qui piétinaient sur place.
Puis, éblouis par le soleil et recueillis, nous sommes revenus en arrière, près du catafalque fleuri, et sommes descendus dans le sombre caveau où, en face de Victor Hugo, un sarcophage de pierre attendait Émile Zola.
Quelques mois avant le Panthéon, la municipalité se Suresnes avait décidé d’élever un monument à Zola : Émile Derré avait sculpté, pour la circonstance, un buste extraordinaire de vérité et de ressemblance. Une fête populaire organisée par le maître Gustave Charpentier, s’était déroulée sur une place de la petite ville. Les années passèrent, Aix-en-Provence, en 1912, glorifia à son tour le grand romancier. Sur la maison de la rue Saint-Joseph, où Zola naquit le 2 avril 1840, on fixa une plaque commémorative le 27 janvier 1924.
Un comité s’était formé, au lendemain de la mort de Zola, sous les auspices de la Ligue des Droits de l’Homme, pour lui élever un monument. M. Mathias Morhardt, président du Comité de la statue, et le poëte Léon Riotor, conseiller municipal de Paris, obtinrent, en 1924, l’emplacement sollicité. Le grand sculpteur Constantin Meunier fut chargé de son exécution. Sa mort ayant laissé l’œuvre inachevée, les figures allégoriques du Travail et de Fécondité durent être confiées à un autre sculpteur, Alexandre Charpentier.
L’œuvre admirable qui sortit de cette collaboration s’élève avenue Émile-Zola, où elle fut inaugurée, le 15 juin 1924, au milieu d’une assistance respectueusement attentive. De nombreux discours célébrèrent la vie du plus grand, peut-être, des romanciers du XIXe siècle. Émile Zola, debout sur son piédestal, marche, la tête haute, vers l’avenir meilleur, celui des Quatre Évangiles.
Une marée humaine, composée d’hommes, de femmes, d’enfants, défila, pendant des heures, en l’après-midi de ce 15 juin 1924, au Panthéon, devant le buste d’Émile Zola, par Philippe Solari, qu’on avait dressé au fond de la grande nef. Ce long cortège se déroula sans un cri, dans un silence frémissant, et c’est cette manifestation-là qui, dans sa simplicité éloquente, célébra le plus noblement l’admiration du peuple de Paris. Le soir de ce même jour, une fête solennelle eut lieu au Trocadéro et termina cette journée triomphale.
Depuis nombre d’années, il existe une Société des Amis d’Émile Zola qui publie un Bulletin renfermant tous les documents qui paraissent, tous les comptes rendus des cérémonies commémoratives.
Une manifestation des camelots du roi excités par M. Léon Daudet, hurlait à la mort, tandis que le cercueil montait les marches du temple de gloire et qu’un formidable service d’ordre entourait le monument.
Quelle honte pour ceux qui poussaient ces cris odieux contre un mort ! Et quelle indignation soulevait nos amis ! Cette translation, qui aurait dû s’accomplir dans un calme imposant, se trouvait encore grandie par les sifflets et les injures. Toute la nuit, la manifestation continua pour s’achever au matin.
Le Président de la République, Armand Fallière, Georges Clemenceau et le général Picquart, parvenus tous deux au pouvoir, assistaient au premier rang à l’apothéose officielle du lendemain. M. Gaston Doumergue, ministre de l’Instruction publique, lut le panégyrique d’usage.
Le catafalque disparaissait sous les fleurs, un détachement de gardes républicain, sabre au clair, montait la garde tout autour. Le vaste et grandiose vaisseau du Panthéon était comble, les uniformes, les toilettes se pressaient de tous côtés. La musique de Bruneau emplissait les voûtes sonores de son ample symphonie. La cérémonie s’achevait dans un calme auguste, lorsqu’un misérable tira sur Alfred Dreyfus et le blessa au bras. Durant un instant, une émotion poignante étreignit l’assemblée qui, peu après, rassurée quant à la légèreté de l’attentat, sortit sur les marches entre les hautes colonnes, pour voir défiler les troupes sous le clair soleil, aux accents des sonneries des divers régiments groupés devant la Mairie du Ve et la Faculté de Droit, casques brillant aux rayons de midi, culottes blanches se détachant sur les chevaux qui piétinaient sur place.
Puis, éblouis par le soleil et recueillis, nous sommes revenus en arrière, près du catafalque fleuri, et sommes descendus dans le sombre caveau où, en face de Victor Hugo, un sarcophage de pierre attendait Émile Zola.
Quelques mois avant le Panthéon, la municipalité se Suresnes avait décidé d’élever un monument à Zola : Émile Derré avait sculpté, pour la circonstance, un buste extraordinaire de vérité et de ressemblance. Une fête populaire organisée par le maître Gustave Charpentier, s’était déroulée sur une place de la petite ville. Les années passèrent, Aix-en-Provence, en 1912, glorifia à son tour le grand romancier. Sur la maison de la rue Saint-Joseph, où Zola naquit le 2 avril 1840, on fixa une plaque commémorative le 27 janvier 1924.
Un comité s’était formé, au lendemain de la mort de Zola, sous les auspices de la Ligue des Droits de l’Homme, pour lui élever un monument. M. Mathias Morhardt, président du Comité de la statue, et le poëte Léon Riotor, conseiller municipal de Paris, obtinrent, en 1924, l’emplacement sollicité. Le grand sculpteur Constantin Meunier fut chargé de son exécution. Sa mort ayant laissé l’œuvre inachevée, les figures allégoriques du Travail et de Fécondité durent être confiées à un autre sculpteur, Alexandre Charpentier.
L’œuvre admirable qui sortit de cette collaboration s’élève avenue Émile-Zola, où elle fut inaugurée, le 15 juin 1924, au milieu d’une assistance respectueusement attentive. De nombreux discours célébrèrent la vie du plus grand, peut-être, des romanciers du XIXe siècle. Émile Zola, debout sur son piédestal, marche, la tête haute, vers l’avenir meilleur, celui des Quatre Évangiles.
Une marée humaine, composée d’hommes, de femmes, d’enfants, défila, pendant des heures, en l’après-midi de ce 15 juin 1924, au Panthéon, devant le buste d’Émile Zola, par Philippe Solari, qu’on avait dressé au fond de la grande nef. Ce long cortège se déroula sans un cri, dans un silence frémissant, et c’est cette manifestation-là qui, dans sa simplicité éloquente, célébra le plus noblement l’admiration du peuple de Paris. Le soir de ce même jour, une fête solennelle eut lieu au Trocadéro et termina cette journée triomphale.
Depuis nombre d’années, il existe une Société des Amis d’Émile Zola qui publie un Bulletin renfermant tous les documents qui paraissent, tous les comptes rendus des cérémonies commémoratives.
Denise Le Blond-Zola
Étang-la-Ville, le 5 septembre 1927.
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" Édité dans le but de mieux connaître et aimer Émile ZOLA "
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